Rencontre avec Thibault Martel et Baptiste Rivière, lauréats Prix du Public aux TheFork Awards 2023
Depuis 2019, les TheFork Awards révèlent et soutiennent une nouvelle génération de chefs partout en France. La participation croissante et l’investissement toujours plus important des chefs étoilés à travers la découverte et le parrainage de talents émergents a permis, cette année encore, de célébrer et d’encourager les grands de demain. Mais ce prix n’existerait pas sans le grand public et la communauté TheFork qui s’expriment à travers leur vote final, du jamais vu dans un prix gastronomique !
Pour sa quatrième édition, les TheFork Awards ont mis le cap sur les Hauts-de-France, labellisés Région Européenne de la Gastronomie. Le rendez-vous était donné à l’Opéra de Lille où s’est tenue la cérémonie de remise des prix lundi 13 novembre dernier. Parrainés par Christian Têtedoie et Christophe Marguin, les chefs du restaurant Armada à Lyon ont reçu le Prix du Public. Rencontre avec deux chefs qui n’ont pas fini de faire parler d’eux.
Vous attendiez-vous à gagner un prix ?
Thibault Martel (TB) : Je ne m’y attendais pas ! Il y avait beaucoup de sélectionnés, je n’étais pas le plus confiant de l’équipe. Baptiste avait plus d’espoir…
Baptiste Rivière (BR) : On a fait une bonne campagne de publicité via Instagram avec des vidéos sympas et on en a discuté avec les habitués de notre restaurant ce qui a sûrement contribué à ce qu’on gagne ce prix. On a la chance d’avoir une belle communauté qui nous soutient.
Est-ce que le fait d'être nommé, puis l’appel au vote et enfin, la remise de cet Award ont eu un impact sur les réservations dans votre restaurant ?
BR : Oui, on a eu de belles retombées et ça continue. On a constaté une augmentation de 20% des réservations grâce à ce prix. On a un grand restaurant donc on avait de la marge pour honorer les demandes.
TM : Après avoir gagné ce prix, des articles sont parus dans les médias lyonnais et on a remarqué que le téléphone sonnait beaucoup plus fréquemment !
Que retenez-vous de la soirée des Awards à Lille ? Racontez-nous une anecdote...
TM : La soirée de gala était magnifique et très bien organisée, on a bien mangé et bien bu. J’ai travaillé à Lille pendant deux ans il y a quelques années donc le lendemain on a été fêté chez les copains du Braque et du Rozo. Ah et aussi, on connaît bien Matan Zaken donc c’était très drôle de le retrouver et de préparer de faux discours ensemble dans le bus sans savoir qu’on gagnerait tous un prix le soir même !
BR : La soirée de gala était vraiment sympa !
Quels sont vos liens avec vos parrains, notamment Christian Têtedoie qui était à vos côtés lors de la remise du prix ? On lui transmet un petit mot de votre part ?
BR : On s’est rencontrés Thibault et moi chez Christian Têtedoie il y a une dizaine d’années. On a toujours de bons contacts avec lui, il est très bienveillant. On se croise régulièrement à Lyon et on entretient une belle relation. Et puis on était très touchés que Christian fasse l’aller-retour jusqu’à Lille pour nous soutenir !
TM : C’est papa ! Voir la fierté dans ses yeux 10 ans après, c'est émouvant.
Merci à Christian Têtedoie, c’est ici que tout a commencé, le début d’une amitié et l’apprentissage de la cuisine
Et vos clients, s’ils étaient en face de vous en ce moment, vous leur diriez quoi ?
Merci à nos clients, nos amis, nos familles et nos collaborateurs. Et merci beaucoup à nos deux associés qui font tout ce que Baptiste et moi ne faisons pas. Sans Rebecca Guyon et David Tapiero, Armada n’existerait pas.
Quelle est votre histoire et celle de votre resto ? On veut tout savoir !
TM : Tout a commencé par hasard. J’ai rencontré David et Rebecca dans le restaurant où je travaillais à l’époque. Le service était plutôt calme ce jour-là donc j’ai vraiment pris le temps de m’occuper de leur table. Il y a eu un vrai coup de cœur. Quelques mois plus tard, ils m’ont proposé de reprendre le Tire-bouchon à Lyon (qui deviendra, quelques mois plus tard, Armada). J’avais en tête de travailler avec Baptiste depuis plusieurs années donc j’en ai parlé à David et Rebecca. Quelques mois plus tard, il nous a rejoint dans l’aventure et on a créé Armada. Ce qui est dingue c’est que David et Rebecca nous ont fait confiance de A à Z sans nous connaître ni d’Eve ni d’Adam. Il y a eu un vrai feeling !
BR : On est d’autant plus content qu’on se situe dans le Vieux Lyon qui n’est pas une zone très facile pour le concept qui était visé.
TM : Les assiettes à partager sont très en vogue à Paris ou Marseille mais à Lyon c’est pas encore ça, c’était un pari plutôt risqué ! On a travaillé dur pendant un an et on est très contents.
BR : Et puis on a enfin l’opportunité de faire notre propre cuisine et d’être libres dans nos choix, c’est précieux.
Comment définissez-vous votre cuisine, qu’est-ce qui claque dans vos assiettes ?
BR : On essaye de retranscrire nos voyages dans nos assiettes. Il y a toujours de beaux assaisonnements et une belle acidité. On met un point d’honneur sur le sourcing des produits donc on travaille avec de petits fournisseurs indépendants qui sont devenus des copains au fil du temps. On fait vraiment attention à utiliser des produits qui soient, au minimum, français.
TM : On est proches de nos fournisseurs, ils viennent nous voir une fois par semaine, on discute et on prend un café avec eux. On fait une cuisine sans codes, il n’y a pas de règle. On peut faire un kebab un jour et un colvert en trois services le lendemain. On s’amuse de la street-food au gastro en passant par tout ce qu’il y a entre les deux. Et aussi on essaye qu’il y ait toujours des propositions végétariennes et des assiettes “entrée de gamme” de façon à ce qu’il y en ai pour tous les goûts et tous les porte-monnaies.
On ressent des influences venues du monde entier dans votre cuisine. Vous avez beaucoup bourlingué ? Ensemble parfois ?
BR : On a vécu deux ans et demi à Londres. On est aussi partis en Colombie, où je suis resté un peu plus longtemps que Thibault. On s’amuse donc à cuisiner des tacos et des arepas lorsque vient la saison du maïs. En fait, on aime cuisiner des produits français avec des techniques venues d’ailleurs.
TM : En habitant à Londres, on voyage, c’est une ville qui relie le monde entier. Là-bas, j’ai travaillé avec des israéliens, des asiatiques, des gens venus de toute l’Europe. Notre cuisine reflète ces différentes expériences. On aime beaucoup le fumé, on travaille avec un barbecue japonais et puis on aime bien le piment aussi pour relever nos plats.
Quel est votre meilleur souvenir gustatif ?
TM : On a pris une grosse claque après les TheFork Awards en allant manger chez Rozo. C’est un restaurant vraiment incroyable.
BR : J’ai vécu trois ans en Colombie et ma femme est colombienne. Il y a des choses que j’ai beaucoup mangé là-bas comme le riz aux lentilles, un plat délicieux qui fait partie de mes meilleurs souvenirs gustatifs.
Si vous aviez un conseil à donner à un jeune chef qui aimerait ouvrir son premier restaurant ?
BR : Il ne faut pas réfléchir !
TM : Un petit peu quand même…
BR : On y est allés à fond, on a toujours fait ce qui nous plaisait sans trop se soucier du reste et ça nous a plutôt souri depuis le début.
TM : Je dirai qu’il ne faut pas se lancer trop vite et qu’il faut avoir un minimum de réseau dans la ville dans laquelle on s’installe. Être prudent aussi, ne pas lâcher tous les chevaux dès le départ… Mon conseil est de commencer simplement et de monter crescendo. Inutile de mettre autant d’énergie dans un projet si c’est pour terminer en burn out trois mois plus tard.
À propos de Thibault Martel et Baptiste Rivière :
Loin des traditionnels bouchons du Vieux-Lyon, l'adresse de Thibault Martel et Baptiste Rivière combine plaisir régressif de la street-food, convivialité du bistrot et techniques de la grande cuisine gastronomique. À la carte, une "armada" d'assiettes à partager concoctées à quatre mains par ces deux anciens de chez Christian Têtedoie. Moules, mole et herbes ; asperges vertes, fêta, ail des ours et fèves ou original boudin, seiche et kimchi : leur créativité se ressent dans chaque assiette et s'accompagne d'une belle sélection de vins biologiques et naturels.
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