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Interviews

Prix du Public TheFork Awards 2021 :  Rencontre avec Erwann Le Pogam, chef du restaurant Itsasoa à Carnac

08/12/2021
7 minutes

Le 22 novembre dernier, à Marseille, lors de la seconde édition des TheFork Awards 2021, le chef carnacois a été récompensé du Prix du Public, une consécration pour cet autodidacte. 

Si son restaurant s’appelle “Itsasoa” qui signifie “la mer” en basque c’est parce qu’Erwann Le Pogam est profondément attaché au grand bleu. Celui qui a fait ses classes là où l’on parle l’euskara s’est installé à Carnac en juin 2021 et a ouvert Itsasoa, son premier restaurant qui propose une cuisine végétale et iodée, en harmonie avec le terroir breton. Sa rencontre à Carnac avec Christophe Pelé, le chef doublement étoilé du Clarence à Paris et spécialiste des associations terre-mer sera décisive puisqu’il choisira de parrainer Erwann le Pogam aux TheFork Awards 2021.


TheFork, partenaire d’Itsasoa a rencontré Erwann Le Pogam pour qu’il nous parle de son prix et qu’il nous raconte son histoire.

“TheFork Awards” est le premier prix du public qui a pour objectif de révéler une nouvelle génération de chefs prometteurs dans toute la France. À l’occasion de cette seconde édition, TheFork Awards tient aussi à soutenir les jeunes chefs qui ont ouvert leur établissement dans un contexte difficile de crise sanitaire. Ce prix, c’est avant tout le prix du public et de la communauté TheFork qui a pu élire son adresse préférée parmi une sélection de restaurants parrainés par des chefs étoilés de renom.

 

Que représente ce prix pour vous ? 

C’est une grande fierté. Je suis autodidacte et je me suis reconverti dans la cuisine sur le tas alors c’est une vraie belle reconnaissance. Le fait d’être nominé par un chef deux étoiles MICHELIN et d’avoir reçu le Prix du Public est une très grande fierté qui me donne beaucoup de motivation et de détermination pour la suite. C’est un bel encouragement !

 

Quel est votre lien avec votre parrain Christophe Pelé ?

Pour l’anecdote, lorsque je me suis installé en Bretagne je vivais de petits boulots en attendant d’ouvrir mon restaurant. Un jour, un ami m’a demandé de l’aider à déménager un restaurateur parisien... je n’imaginais pas du tout de qui il s’agissait. Quelques années plus tard, alors que je discutais avec un autre ami mareyeur à La Trinité qui fournit les plus grandes tables en poisson, il me raconte que Christophe Pelé, avec qui il était la veille, se souvient de moi. Je ne voyais pas du tout de quoi il parlait jusqu’à ce qu’il m’explique que j’avais fait son déménagement cinq ans plus tôt ! Quand il a su que j’ouvrais Itsasoa à Carnac, il est passé me voir pendant les travaux, on a sympathisé et il m’a donné des conseils. 

À l’ouverture, il est venu manger et a beaucoup apprécié ma cuisine. Comme il le dit, elle est simple et lisible mais aussi généreuse et faite avec le cœur en utilisant de jolis produits. Un jour, j’ai reçu un appel de TheFork, me disant que j’avais été nommé par Christophe Pelé dans le cadre des TheFork Awards 2021. Depuis, je lui écris régulièrement, je lui évoque mes doutes et il me répond toujours avec bienveillance et gentillesse. Ça me touche beaucoup car je sais qu’il n’a pas pour habitude de prendre de jeunes cuisiniers sous son aile. 

 

Vous étiez machiniste sur des tournages de cinéma avant de vous reconvertir dans la cuisine. Quel a été le déclic ? 

Je cuisinais beaucoup à la maison et, à l’époque, j’avais une petite amie qui me soutenait dans tout ce que je faisais et qui m'entendait beaucoup me plaindre de ma situation sur les tournages. Je faisais ça pour l’aspect pécunier et parce que j’ai grandi dans ce milieu mais je n’étais pas épanoui. 

En parallèle, dès que j’avais du temps, j’allais au marché où j’adorais toucher et sentir les produits. Le commun des mortels dirait que j’avais une relation presque anormale aux produits de qualité. Un jour, alors qu’on regardait l’émission Top Chef, mon ex petite amie m’a dit “tu voudrais pas essayer d’être cuisinier ?”. Ça a été l’étincelle. J’ai fait un dernier long-métrage en 2012 et, un matin, je me suis levé, je me suis regardé dans la glace, et je me suis dit que c’était terminé. Ma décision était prise : je quittais les tournages pour devenir cuisinier. Je suis d’abord monté à Paris dans le but de m’inscrire à Ferrandi mais pas de chance, les inscriptions venaient de se terminer et je ne me voyais pas attendre encore un an pour pouvoir m’inscrire l’année suivante. Tandis que j’étais en vacances en Bretagne, par hasard, j’ai été poser mes questions au CFA de Vannes. Je suis tombé sur une personne superbe qui s’est occupée de tout. C’est comme ça que je me suis installé en Bretagne. J’ai alors fait mon apprentissage dans une maison étoilée, au Petit Hôtel du Grand Large à Portivy.

 

Racontez-nous votre histoire et celle de votre restaurant Itsasoa...

Après mon “jeune” parcours de cuisinier, j’ai très vite brûlé les étapes. Je suis curieux, autodidacte et passionné et aujourd’hui avec internet, on a accès à un tel savoir ! On peut se cultiver très facilement : voir ce qui se fait, avoir des idées de plats et aussi de dressage. On a accès à beaucoup de culture. Moi, je passais beaucoup de temps à lire des revues culinaires et des livres de recettes. Je faisais aussi beaucoup de veille sur Instagram, particulièrement de cuisine bistrot, ce vers quoi je me suis tourné. En même temps, j’avais à cœur d’aller chercher les meilleurs produits donc je rendais souvent visite aux producteurs, aux pêcheurs, aux mareyeurs, aux ostréiculteurs et aux maraîchers. 

 

Pour ouvrir mon restaurant, il fallait que je discute avec eux pour comprendre leur façon de travailler car quand j’ai quitté le cinéma, mon but premier c’était d’ouvrir un restaurant pour mettre en lumière le travail d’acteurs locaux. Pour moi, c’est le rôle d’un restaurant aujourd’hui. 

Un jour, j’ai visité une institution carnacoise qui, à l’époque, s'appelait La Brigantine. Je suis entré dans un lieu chargé d’énergies positives où je me suis tout de suite senti chez moi et où j’ai d’emblée visualisé mon projet. Il me restait donc à trouver un nom qui retrace mon parcours personnel. J’ai grandi au Pays Basque, à Biarritz et mon histoire a toujours été liée à l’océan et à la mer. “Itsasoa” signifie “la mer” en basque. Et puis, c’était une façon de me démarquer car donner un nom basque à un restaurant en Bretagne... ce n’est pas très commun. 

Comment définiriez-vous votre cuisine ?

Ma cuisine est gourmande, généreuse, iodée, végétale et toujours centrée sur le joli produit ! En ce moment, je travaille l’oursin. J’ai eu un gros coup de cœur pour ce produit. Un matin, j’en ai dégusté un et j’ai vraiment pris un punch d’iode qui m’a donné envie de le mettre à la carte. Je le travaille avec des chanterelles et des blettes en escabèche accompagné d’un sabayon oursin-yuzu et je garde les langues d’oursin au naturel. J’ai essayé de trouver un plat gourmand, de saison, qui ne trahisse ni le goût, ni l’identité culinaire de l’oursin. 

 

Où trouvez-vous votre inspiration ?

Je trouve mon inspiration lorsque je suis face à la mer. Je la trouve aussi dans les livres, en m’inspirant de grands chefs, quand je vais au marché. C’est souvent une question de moment mais toujours en harmonie avec les saisons. 

Je la trouve aussi grâce à mon équipe avec qui on travaille avec une véritable dynamique d’échanges. Je me nourris de leurs idées et je leur demande souvent des retours, j’insiste pour qu’ils goûtent afin de recadrer quand ça ne va pas. Je pense qu’avec des palais de cuisiniers, on veut parfois donner un sens à un plat qui peut ne pas être compris par des palais plus “standards”. Le rôle du cuisinier, c’est de petit à petit amener les clients vers une cuisine signée et personnelle. En tant que jeune cuisinier, j’ai à cœur de plaire à une clientèle qui accroche à l’identité du restaurant.

 

Quels sont vos projets futurs ? 

Faire en sorte que Itsasoa soit une réussite. À plus long terme, mon rêve serait de reprendre un vieux corps de ferme, un peu excentré et d’en faire une auberge gastronomique avec des chambres. Un endroit qui fonctionne comme une sorte de communauté avec des maraîchers et des éleveurs qui feraient du fromage et qu’au milieu de toute cette communauté, il y ait un restaurant qui puisse faire vivre tout le monde. 

 

 

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